Comptes rendus La jolie Périchole d’Avignon
Comptes rendus

La jolie Périchole d’Avignon

01/12/2019

Opéra Confluence, 8 novembre

Tandis que la salle historique, située place de l’Horloge, en plein cœur d’Avignon, poursuit sa restauration – elle doit rouvrir en octobre 2020 –, on retrouve l’atmosphère boisée du chapiteau dressé en face de la gare TGV : l’Opéra Confluence. Sans doute cet espace est-il un peu vaste pour La Périchole, mais il a l’avantage d’accueillir, en disposition frontale, un nombreux public qui ne ménage pas ses bravos.

Après avoir dirigé l’Opéra-Théâtre de Metz Métropole et l’Opéra Nice Côte d’Azur, Éric Chevalier ne prend pas sa retraite : au contraire, il cumule les casquettes, signant pour cette nouvelle production mise en scène, décors, costumes et lumières. Et, théâtralement comme musicalement, la soirée est une réussite complète.

Comme le chapiteau n’offre naturellement pas de cintres, pas question de changer les décors. Éric Chevalier résout la question grâce à des parois qui peuvent bouger, avec la vidéo qui les colore. Au début, les murs de Lima sont jaunes, avec des ponchos et du linge qui sèche. Les costumes vont de l’ocre au vieux rose, la touche péruvienne étant apportée par tricornes et grands chapeaux.

Don Andrès, le vice-roi, est en cape noire avec une fraise blanche. La Périchole aguiche Piquillo de son escarpin rouge. Sur les murs apparaissent des graffitis qui témoignent de la colère du peuple : « El virrey es un culo ! » Les parois virent au bleu, puis laissent la place à des arcades. Dans le palais, des portraits de Don Andrès, encadrés d’or, sont disposés à la va-comme-je-te-pousse.

Sous la direction avisée de Samuel Jean, l’Orchestre Régional Avignon-Provence passe avec dextérité des airs sentimentaux aux passages comiques. Le Chœur de l’Opéra Grand Avignon, que dirige Aurore Marchand, lance avec brio les refrains les plus célèbres.

Marie Karall est une Périchole de grande allure, à la silhouette élégante et au chant séduisant. Son Piquillo, Pierre Dehret, se montre enjoué et plein de sensibilité. Philippe Ermelier est un Don Andrès truculent, tandis que les courtisans, Enguerrand de Hys et Ugo Rabec, forment le doublé cocasse du petit rageur et de la grande perche solennelle.

Alain Iltis est un pittoresque Marquis de Tarapote, et le rôle parlé du Vieux Prisonnier, mis en valeur par ses apparitions en lever de rideau, a en Jean-Claude Calon un interprète savoureux. Ludivine Gombert, Roxane Chalard et Christine Craipeau ont du charme à revendre, sachant donner à leurs interventions la touche insolente et désinvolte typique d’Offenbach. Jusqu’aux deux Notaires, ivres morts et la perruque en bataille, qui trouvent en Olivier Montmory et Pierre-Antoine Chaumien un duo divertissant.

Le plaisir de la soirée, c’est qu’on redécouvre, grâce à cette distribution jeune et spontanée, les airs les plus connus, tandis que la partition n’a jamais paru aussi variée et ironique. Au final, le public ravi scande et accompagne le chœur, laissant espérer que cette production, en tous points réussie, fera l’objet d’une reprise, la saison prochaine.

BRUNO VILLIEN

PHOTO © CÉDRIC & MICKAËL/STUDIO DELESTRADE

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