© MICHAEL HART

Après A Midsummer Night’s Dream et Madama Butterfly, le réalisateur américain signe sa troisième production pour l’Opéra Orchestre National Montpellier en moins d’un an : Il trionfo del Tempo e del Disinganno de Haendel, à partir du 10 février.

En quoi consiste votre actuelle résidence artistique à Montpellier ?

Quand Valérie Chevalier, la directrice générale de l’Opéra Orchestre National Montpellier, m’a fait cette proposition, j’y ai vu une grande chance : d’abord, c’est une ville que j’adore (je l’ai découverte par hasard à 18 ans, en manquant une correspondance !) ; ensuite et surtout, cela permet de développer une relation de fidélité avec une maison et un public. Nous sommes tombés d’accord sur quatre titres on ne peut plus différents. J’ai ouvert ma résidence, en mai dernier, avec une nouvelle production de A Midsummer Night’s Dream de Britten, compositeur pour lequel j’ai une grande tendresse depuis mes 7 ans, quand je faisais partie d’un chœur d’enfants, à New York. Le deuxième titre a été Madama Butterfly, spectacle créé à Zurich, en 2017, qui a ouvert la saison en cours. Et c’est maintenant le tour d’Il trionfo del Tempo e del Disinganno de Haendel, production qui a vu le jour à Copenhague, en 2019.

Comment avez-vous traité un oratorio où il n’y a pas de vrais personnages, mais seulement des allégories, pas d’action véritable non plus, mais un débat d’idées, une psychomachie à portée morale, voire religieuse ?

Je suis parti de l’idée que tout tourne ici autour de Bellezza (La Beauté). Elle se dit constamment : « Un jour, je ne serai plus belle. » Cette pensée va l’obséder au point qu’elle finira par se dire : « Un jour, je mourrai. » Tout se passe dans la tête de cette femme d’aujourd’hui qui convoque, dans sa mémoire, les autres personnages – sans doute des personnes réelles ayant traversé sa vie –, pour imaginer divers événements, différentes discussions…

Pour vous, qui avez déjà monté Rinaldo – une vraie histoire, avec une action et des personnages –, comment mettre en scène différemment deux airs quasi semblables, comme « Lascia la spina » et « Lascia ch’io pianga » ?

C’est un exemple très intéressant de réemploi musical pour un résultat totalement différent. En effet, dans Il trionfo del Tempo e del Disinganno, « Lascia la spina » intervient à la fin de l’ouvrage, quand Piacere (Le Plaisir) comprend qu’il ne pourra pas convaincre Bellezza, définitivement sous l’influence de Tempo (Le Temps) et de Disinganno (La Désillusion). C’est son tout dernier essai pour la persuader, et le paradoxe est que la musique la plus séduisante qui soit sert à Piacere à célébrer, en quelque sorte, son propre échec ! Comme si Haendel faisait tout pour nous faire comprendre que cette beauté est mensongère, et qu’il ne faut pas y succomber… Quand, quelques années plus tard, il réutilise cette musique pour Rinaldo, le contexte dramatique est complètement différent : Almirena, prisonnière de la magicienne Armida et séparée de son bien-aimé Rinaldo, chante son désespoir et l’on ne peut qu’être touché par sa sincérité.

Lire la suite dans Opéra Magazine numéro 158

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