© YAN BLENEY

Mariés et parents d’un petit Noah, le baryton canadien et la soprano australienne ont choisi la France comme port d’attache et viennent d’acheter un appartement à Paris. Le cadre idéal pour préparer la nouvelle production de Don Giovanni au Palais Garnier, à partir du 11 juin, dans laquelle Etienne Dupuis incarnera le libertin, face à Nicole Car en Donna Elvira. Un partage auquel les deux artistes sont extrêmement attachés, au point de se faire engager le plus souvent possible dans les mêmes spectacles, comme ce fut le cas, ces derniers mois, dans La traviata et Faust à l’Opéra de Marseille.

Vous vous êtes rencontrés sur une production d’Eugène Onéguine, en avril 2015, au Deutsche Oper de Berlin. Le coup de foudre a-t-il été immédiat ?

Etienne Dupuis : J’ai fait mes débuts en Posa et en Onéguine en même temps. Et la première de Don Carlo avait lieu le même jour que la première répétition d’Eugène Onéguine, à laquelle j’avais accepté d’aller car je n’avais rien d’autre à chanter que le quatuor du premier acte. C’est là que j’ai rencontré Nicole, qui incarnait Tatiana. Le lendemain, j’étais encore sur un nuage, tant la réaction du public avait été extraordinaire pour Don Carlo : à chaque fois que l’un de nous entrait en scène, il applaudissait à tout rompre. Sans faire de distinction entre Rolando Villazon, Anja Harteros, ou moi ! Je n’avais jamais vécu cela.

Nicole Car : Etienne se vantait d’avoir fait le meilleur spectacle de toute sa vie ! Je me suis dit qu’il ne manquait pas d’ego…

E. D. : J’avais la grosse tête ! Quelques jours plus tard, Nicole est quand même venue me voir pour me demander si je pouvais lui faire découvrir un peu Berlin. C’était le 1er mai, tout était fermé. Nous sommes allés nous promener, et c’est là que nous avons commencé à nous dire que nous pourrions devenir plus que des amis.

N. C. : Les premiers temps ont été difficiles, car nos agendas étaient déjà pleins pour les années à venir. Etienne devait partir pour faire L’Heure espagnole et L’Enfant et les sortilèges à Glyndebourne, et moi pour chanter Le nozze di Figaro à Sydney. Nous avons été tout de suite séparés pendant trois mois.

E. D. : Chacun d’un côté du globe !

N. C. : Berlin est comme notre deuxième maison. Et Noah, notre fils, un bébé du Deutsche Oper !

E. D. : Christoph Seuferle, directeur de l’opéra au Deutsche Oper, nous a dit qu’il fallait qu’on l’appelle comme lui, puisqu’il était à l’origine de notre rencontre. Et Jonathan Friend, administrateur artistique au Metropolitan Opera de New York, qui ne s’exprime quasiment que sur le ton de l’ironie, nous a promis mille dollars de plus par représentation si nous donnions son prénom à notre fils ! Avoir un enfant dans ce milieu suscite des réactions très sympathiques.

Désormais, vous chantez régulièrement ensemble…

N. C. : C’est une chance que la plupart des maisons d’opéra nous apprécient l’un et l’autre, et comprennent qu’il est très important pour nous de rester en famille, avec notre fils.

E. D. : J’ai été agréablement surpris, car à une époque pas si lointaine, l’arrivée d’un enfant pouvait signifier la fin de la carrière pour la mère. Dans notre cas, c’est plutôt l’effet inverse. Tant nos agents que les directeurs artistiques mettent la main à la pâte ! Une des raisons pour lesquelles nous plaisons tous les deux à ces derniers est que nous sommes des chanteurs similaires, dans le sens où nous nous investissons dans tout le spectacle, plutôt que de ne penser qu’à notre petite personne. Les critiques qui disent du mal de nos collègues nous affectent, même si elles nous encensent. Quand on travaille pendant des semaines ensemble, on apprend à se connaître, à s’apprécier, à se respecter. Quoi qu’il en soit, il est devenu très rare qu’une maison engage l’un de nous deux seulement.

Lire la suite dans Opéra Magazine numéro 151

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