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Du 1er au 5 mars, l’Opéra Nice Côte d’Azur propose une nouvelle production de The Rake’s Progress, le chef-d’œuvre de Stravinsky, avec une distribution majoritairement française, emmenée par Julien Behr et Vincent Le Texier. À quoi ressemblera-t-elle visuellement ? Réponse dans ce qui suit…

Quelle est, selon vous, la singularité de The Rake’s Progress ?

Ce qui m’a d’emblée frappé, c’est la coexistence d’une fable morale très assumée et d’une dramaturgie d’une grande modernité. Le livret est, en effet, empreint de toutes les références de la première moitié du XXe siècle, y compris le théâtre de l’absurde pour l’épisode de Baba, totalement immaîtrisable. Cette hétérogénéité m’a posé question en tant que metteur en scène, et il m’a paru évident de revenir à l’origine de la démarche de Stravinsky et d’Auden, à ces gravures de William Hogarth, lui-même peintre moraliste.

Ces gravures ont donc nourri le travail avec votre scénographe Mathias Baudry…

C’est surtout le passage d’un art à l’autre qui nous a passionnés, plus que les peintures elles-mêmes. Nous avons eu besoin de comprendre intimement les mécanismes d’une telle transfiguration en opéra, comment on avait pu faire du théâtre musical à partir d’une proposition graphique, alors qu’il y a un fossé entre le statisme de la toile et les enjeux de mouvements d’un spectacle vivant. Le geste artistique d’un graveur, même s’il est aussi dramaturge, est très éloigné de celui d’un musicien et de son librettiste. En tant que concepteurs scéniques, nous sommes nous-mêmes dans une démarche d’artisanat, finalement plus proche de celle d’Hogarth.

Que montrera le spectacle ?

J’ai demandé à Mathias Baudry de travailler sur la tension entre picturalité et espace scénique, fixité et mouvement. Nous avons pensé, dans un premier temps, transposer l’action dans une salle de l’Art Institute de Chicago où, lors d’une exposition, Stravinsky avait découvert les gravures d’Hogarth, mais nous nous sommes finalement détachés de cette idée. L’espace s’articule désormais autour du cadre du tableau, à l’intérieur duquel Tom Rakewell est enfermé, subissant une dramaturgie imposée pour les besoins d’une morale. Le reste de la scénographie et l’avancée de l’histoire s’organisent autour de ce cadre fixe et lumineux, dans un univers inspiré par le cabaret. Nous n’avons pas voulu faire de choix de contexte ; nous ne sommes nulle part ailleurs que sur un plateau de théâtre, dont nous exploitons toutes les ressources.

Lire la suite dans Opéra Magazine numéro 147

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