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© SIMON FOWLER/ERATO WARNER CLASSICS

L’automne est mozartien pour la jeune mezzo-soprano française. À peine sortie d’une nouvelle production des Nozze di Figaro à Amsterdam, elle incarne Cherubino à la Scala de Milan jusqu’au 27 novembre. Entre les représentations, deux récitals l’attendent à Paris : le premier avec piano, le 14 novembre, à l’Amphithéâtre Bastille ; le second avec l’ensemble Les Ambassadeurs, à la Salle Gaveau, le 21 novembre, entièrement consacré à Mozart. Un compositeur qui figure également en bonne place dans son premier récital discographique, Oh, Boy !, sorti le 28 octobre, sous étiquette Erato, et nominé pour le prochain palmarès de l’Académie Charles Cros, qui sera proclamé le 24 novembre.

Le programme de votre premier récital discographique, alternant airs de Mozart et airs d’opéra français, s’est-il imposé immédiatement, ou avez-vous envisagé plusieurs options ?

J’ai voulu que ce récital reflète ce que je suis aujourd’hui, plutôt que de me lancer dans quelque chose qui me soit étranger. Cette idée m’a d’ailleurs un peu rassurée. Car le disque me faisait peur : je l’associais à des artistes déjà confirmés, et non à de jeunes interprètes. Je tenais à faire les choses dans l’ordre : me présenter d’abord physiquement, face à un public, avant de lui proposer de me suivre ailleurs. Depuis le début, je chante beaucoup de rôles en pantalon, de par ma typologie vocale. Et quand Erato m’a proposé cet enregistrement, il m’a semblé que les travestis mozartiens allaient de soi. Quoique sans m’y cantonner. J’aime le côté traditionnel de l’opéra – je ne pourrais pas faire ce métier si ce n’était pas le cas –, mais il me fallait trouver un moyen d’aller vers d’autres répertoires, parfois un peu plus légers. J’ai donc imaginé ce programme. Le Palazzetto Bru Zane-Centre de musique romantique française m’a envoyé des partitions, parmi lesquelles j’ai choisi la rare Psyché d’Ambroise Thomas. Et c’est Alain Lanceron, président d’Erato/Warner Classics, qui m’a suggéré Mozart de Reynaldo Hahn, comme une sorte de clin d’œil, et de lien entre les époques.

Votre appréhension de l’enregistrement est-elle tombée une fois dans le studio, face au micro ?

Je n’ai pas eu le temps de stresser, car nous n’avions que cinq jours pour venir à bout d’un programme assez long. Je me suis donc concentrée sur la tâche à accomplir, sans me poser trop de questions. Il m’a quand même fallu toute une session pour m’habituer ! Dans une salle, on doit projeter sa voix, alors que dans un studio, on chante pour le micro, tout en gardant le même type d’émission. C’est à la fois plus confortable, et un peu déroutant. La principale difficulté est de garder l’esprit du direct. Sur scène ou en concert, l’énergie de l’instant fait passer au second plan les erreurs et les petits problèmes. Pendant un enregistrement, il faut être beaucoup plus précis, mais aussi conserver une distance par rapport à ce que l’on fait, pour ne pas tomber dans une obsession de la perfection. Ma grande préoccupation était de rester en forme. Car je ne m’attendais pas à ce que cet exercice, absolument nouveau pour moi, me demande autant d’énergie – l’équivalent, en cinq jours, de deux mois de production… Jamais je n’avais enchaîné autant de contre-ut que durant cette période ! Mais la voix a tenu, sans que je me ménage pour autant.

Marc Minkowski était là pour vous soutenir…

Oui, et il valait mieux ! Le fait d’être enregistré n’en reste pas moins assez anxiogène pour lui, et j’ai eu l’impression que s’il avait accepté, c’était aussi beaucoup pour moi. À certains moments, j’ai senti que nous nous soutenions mutuellement. Notre travail est basé sur l’échange, car Marc est très à l’écoute des chanteurs, et les laisse assez libres. Il a évidemment pris des décisions sur certains tempi, et su me convaincre sur quelques autres. Mais j’ai aussi, parfois, dit non. Après m’avoir confié plusieurs rôles, fait venir à Salzbourg, il voulait que ce disque soit réussi – au point d’avoir presque plus de pression que moi !

Lire la suite dans Opéra Magazine numéro 122

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