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Mario Del Monaco

27/04/2015

Le 27 juillet 1915 naissait à Florence le dernier ténor dramatique italien de l’histoire. Depuis son retrait des scènes, en 1975, et sa disparition, sept ans plus tard, aucun Otello, Dick Johnson, Canio ou Andrea Chénier d’une stature comparable n’a émergé sur la terre de naissance de l’opéra. Pour cela, et aussi pour son énergie, sa puissance et son magnétisme, Mario Del Monaco méritait amplement qu’on lui rende hommage, en cette année de centenaire.

© THE METROPOLITAN OPERA ARCHIVES
Radamès à New York. © THE METROPOLITAN OPERA ARCHIVES

Peut-on évoquer Mario Del Monaco sans rencontrer aussitôt des opinions tranchées ? Aux thuriféraires regrettant l’âge d’or des « grandes voix » s’opposent les amateurs d’un chant plus subtil, qui reprocheront toujours à cet Otello de référence ses emportements excessifs et son manque de civilité. Que préférer alors ? Une personnalité forte, dont les défauts autant que les qualités font battre le pouls des théâtres ? Ou un interprète stylé qui, par sa tenue et sa discrétion de façade, ravit les fins connaisseurs mais laisse de marbre le grand public, avide de performances spectaculaires ? Faux débat assurément, tant l’opéra, art noble et populaire à la fois, a presque toujours joué sur les deux tableaux.

Ceci posé, depuis le milieu du siècle dernier, bien des choses ont changé en la matière, à commencer par le rôle joué par les disques, voire la télévision et le cinéma, dans la connaissance des œuvres lyriques et de leur interprétation « idéale » – si tant est qu’elle existe ! L’immense carrière de Mario Del Monaco s’est déroulée à une période charnière, où une nouvelle modernité venait prendre le relais d’une tradition jugée exsangue par beaucoup. La popularité d’un ténor pouvait-elle encore rivaliser avec celle d’un rockeur, d’un champion olympique ou d’une vedette du grand écran ? À cette question, seuls des tempéraments hors normes étaient en mesure de répondre par l’affirmative.

Un mythe

Car, davantage qu’une célébrité, Mario Del Monaco a été un mythe. En Italie, mais aussi en Amérique du Sud et aux États-Unis, bref partout où l’on attendait prioritairement d’un chanteur d’opéra de la bravoure, de l’éclat et du panache. Des qualités auxquelles le ténor ajoutait un physique avantageux, doublé d’un jeu ne se limitant pas à quelques gesticulations convenues. Cette présence magnétique est restée dans la mémoire de tous ceux qui ont eu la chance de le voir, à la scène ou en récital : « Toute une génération (…) se reconnaît dans l’émission carnassière, véhémente, passionnée et virile de Del Monaco, symbole d’une après-guerre qui libère les esprits, stimule les énergies, incite à vivre intensément et à rattraper le temps perdu », écrit ainsi André Segond, son ardent biographe (Mario Del Monaco ou un ténor de légende, Éditions Jacques-Marie Laffont et Associés, à Lyon, 1981).

Retenons également, sur un ton plus enflammé encore, ces lignes de Jacques Bertrand, présentant l’enregistrement en 33 tours (Epic, 1974) du récital donné à Paris, Salle Pleyel, le 29 septembre 1973, avec l’Orchestre des Concerts Lamoureux : « Mario Del Monaco, vêtu de noir, d’une élégance raffinée, entre : c’est déjà le triomphe, le délire presque !!! Cette ovation impressionnante est, bien sûr, le remerciement à l’artiste d’une prestigieuse carrière, remerciement à l’un des plus grands ténors du XXe siècle. Mais c’est aussi le verdict sans appel envers tous ses détracteurs, bornés, souvent incompétents, plus habitués aux salons mondains qu’aux scènes de théâtre. » Quelque quarante ans plus tard, Alain Duault ne dira pas autre chose quand, dans son Dictionnaire amoureux de l’opéra (Plon, 2012), il affirmera, non sans une pointe de provocation, peut-être : « Les précieux auront beau faire les dégoûtés et les chaisières pouffer dans leurs mouchoirs : il n’empêche que Mario Del Monaco est un des rares véritables ténors héroïques et romantiques de l’opéra italien. »

Premiers pas

Pour mieux mesurer ce qu’a été l’importance de l’artiste dans l’univers de l’opéra au XXe siècle, il est indispensable de revenir sur quelques éléments de sa vie et de sa carrière. Né à Florence, le 27 juillet 1915, au sein d’une famille bourgeoise et cultivée, Mario Del Monaco étudie le chant dès son plus jeune âge (premiers pas en scène, à 13 ans, dans Narcisse, « idylle antique pour solo et chœur » de Massenet) mais, mal conseillé par certains professeurs, éprouve des difficultés à définir son registre exact : ténor dramatique ou lyrique ? Son programme pour le concours organisé par l’Opéra de Rome, en 1936, témoigne de ses hésitations, puisque y figurent à la fois des airs de Tosca, Andrea Chénier et L’elisir d’amore.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, son nom apparaît de plus en plus régulièrement à l’affiche des théâtres italiens, dans Lucia di Lammermoor, Madama Butterfly, Tosca, La Bohème, La traviata, Rigoletto, Cavalleria rusticana… La voix a pris de l’assurance et de l’ampleur, même si elle peinera toujours à atteindre le contre-ut. En 1945, Un ballo in maschera, La Gioconda, Aida et Andrea Chénier entrent à son répertoire. Surtout, la guerre se termine et le ténor, tout en se produisant sur les plus prestigieuses scènes de la Péninsule (Scala de Milan, San Carlo de Naples, Opéra de Rome, Arènes de Vérone…), entame une carrière internationale qui le conduit, notamment, au Grand Théâtre de Genève et au Covent Garden de Londres.

  • Lire la suite dans Opéra Magazine numéro 106 (avec sa discographie)

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