On attendait beaucoup de la première Violetta de Diana Damrau, comme du premier Germont de Placido Domingo. Les deux stars se sont montrées à la hauteur de leur réputation, sous la baguette d’un Yannick Nézet-Séguin auquel la fosse du Met réussit mieux que jamais !

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Présentée pour la première fois au Met pendant la saison 2010-2011, avec Marina Poplavskaya en Violetta, la production conçue par Willy Decker au Festival de Salzbourg 2005, autour de la personnalité d’Anna Netrebko (voir O. M. n° 1 p. 70 de novembre), vient de servir d’écrin à la prise de rôle de Diana Damrau. Pari risqué pour la soprano ­allemande, conclu par l’un des plus spectaculaires triomphes artistiques de sa carrière, sous les ovations d’un public conquis par la séduction de son chant et l’intensité de son jeu.
Après quelques minutes d’échauffement, Diana Damrau trouve ses marques dès le « Brindisi », déployant des arcs mélodiques d’une beauté envoûtante, remarquablement nuancés et constamment mis au service du texte, détaillé sans aucun effet expressif superflu. Dans l’absolu, le moment le plus réussi reste un « Dite alla giovine » d’anthologie, mais on est également saisi par l’« Addio del passato », d’un pathos qui, pour être savamment contrôlé, n’en transperce pas moins le cœur de l’auditeur. Une grande Violetta est née, comme la Scala de Milan, le Covent Garden de Londres et l’Opéra National de Paris pourront le vérifier, la saison prochaine.
Autres débuts, ceux de Placido Domingo qui, après y avoir chanté Alfredo (une douzaine de fois, entre 1970 et 1981) et dirigé La traviata (avec un résultat discutable), a choisi le Met pour aborder Germont. En termes d’écriture vocale, le rôle lui convient beaucoup mieux que Rigoletto, tel que nous l’avions découvert à la télévision. À l’exception de la cabalette « No, non udrai rimproveri », aucun passage ne le met en difficulté, la qualité du legato forçant plus d’une fois l’admiration. Là où Dmitri Hvorostovsky, lors de la dernière reprise de cette production, en 2012, n’était que morgue et hauteur dans sa confrontation avec Violetta, Domingo souligne bien mieux l’évolution psychologique du personnage, montrant de plus en plus d’humanité et de compassion au fil du duo.
Appelé à remplacer Saimir Pirgu quinze minutes seulement avant le début de la représentation, Salvatore Cordella n’a rien de juvénile dans le timbre, ni dans l’allure – on songe davantage à un Roderigo d’Otello ou un Cajus de Falstaff. Mais le ténor italien impose un chant stylé et sûr, notamment au deuxième acte, dans son air et le finale chez Flora.
Les seuls comprimari dignes de mention sont Maria Zifchak et Kyle Pfortmiller. Quant à Yannick Nézet-Séguin, après ses précédentes réussites dans Carmen, Don Carlo et Faust, il livre une lecture captivante de La traviata, soutenant de bout en bout les chanteurs et mettant en exergue les moindres nuances dynamiques du discours verdien.

 

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